Vous êtes les fondateurs de Twomorrow, un magazine qui apporte un regard neuf sur l’écologie et les grands enjeux de notre temps. Quel a été le déclencheur de cette initiative ?
Nous avons tous les deux passé un peu plus de trois ans dans des start-up, à des postes de management et de marketing. Ces premières expériences ont été exigeantes mais très enrichissantes. Nous nous mettons beaucoup de pression pour faire de notre mieux. Mais ensuite, la crise du COVID est arrivée et a tout chamboulé ; nous étions loin de nos équipes, nous nous sentions moins utiles que dans nos emplois précédents. Surtout, nous avons eu tout le temps de nous renseigner sur notre environnement et la crise climatique, de prendre conscience de ce qui se passe, de chercher des alternatives, et sur notre propre quotidien. Ce que nous avons vu et compris était assez déprimant : nous avions l’impression qu’il n’y avait pas de solutions, que tout était sans espoir, punitif et négatif.
Alors on s’est dit qu’il fallait agir à notre niveau. Nous avons quitté nos emplois quelques mois plus tard et nous nous sommes lancés dans le projet Twomorrow, un magazine positif qui se concentre sur les solutions plutôt que sur les problèmes, à travers l’Europe. Nous espérons sensibiliser, éduquer, faire prendre conscience et redonner confiance en l’avenir afin d’initier des changements collectifs et individuels.
Votre magazine est publié à un moment difficile pour le monde des médias, pourquoi avez-vous choisi cette industrie ? Et comment vous démarquez-vous de la masse ?
Il y a un sentiment lointain que les médias se portent très bien. L’actualité, l’actualité, les changements fréquents, la crise du COVID, la géopolitique internationale leur ont donné matière à réflexion, si bien qu’ils ne semblent pas s’en être plus mal sortis que d’autres domaines comme la restauration, la santé ou la culture… En même temps, nous n’avons pas vraiment l’impression de rejoindre cet écosystème, puisque nous lançons un magazine ponctuel : il n’est pas récurrent. Ce sera le fruit d’un an de travail, par deux personnes, et on ne sait pas quelle sera la prochaine étape mais pour le moment, aucun second numéro n’est prévu !
Concernant le style, nous avons longtemps hésité entre un documentaire et un produit imprimé. Les images et les vidéos sont plus faciles à utiliser, plus virales et plus accessibles, mais vous devez les connaître. Et les entretiens à la caméra sont plus intimidants pour les entrepreneurs qu’un dictaphone et un bloc-notes. Nous avons donc voulu créer un cadre plus intimiste pour rencontrer des entreprises, rester dans nos champs d’expertise et surtout avoir un beau souvenir !
Quand on sait que regarder un documentaire de 2h émet autant de CO2 qu’imprimer un livre, on s’est dit qu’il valait mieux avoir un produit qui puisse être lu plusieurs fois, prêté, mis de côté, redécouvert. On a la chance d’avoir une illustration de Malika Favre en couverture : pour moi ça vaut toutes les affiches du documentaire Netflix !
Pensez-vous que votre projet apporte une nouvelle définition du journalisme ?
Honnêtement, pas du tout. Nous ne sommes pas des journalistes et nous ne nous considérons pas comme tels. Nos expériences et nos études font que nous avons une formation intéressante en esthétique, dans le choix des mots et dans le fait de poser les bonnes questions, mais cela ne fait pas de nous des experts. Au contraire, nous voulons nous mettre à la place de nos lecteurs : conscients des enjeux climatiques mais souvent ignorants de ceux-ci. Et donc on pose des questions qui aident à vulgariser le sujet.
Vous avez pour objectif de présenter une vingtaine d’entreprises qui œuvrent déjà pour proposer des solutions durables et avez fourni des critères de sélection pour ces entreprises, mais savez-vous déjà quelles entreprises vous souhaitez inclure ?
Nous connaissons quasiment toutes les entreprises que nous allons rencontrer ! Nous en avons sélectionné environ 20 sur 500 que nous avons examinés. Certains d’entre eux se sont montrés extrêmement réceptifs et accueillants, tandis que d’autres ont répondu « J’ai 30 minutes sur Zoom à vous accorder ». Etant donné que nous voyageons à travers l’Europe pour les rencontrer, nous avons évidemment décliné ce dernier.
Nous ne sommes pas le New York Times, nous devons donc nous en occuper. Mais ce fut un véritable chef-d’œuvre de trouver ces innovations : en consultant les sites de fonds d’investissement, les prix internationaux, les classements et retombées presse, nos réseaux, etc. Au final, celles que nous avons trouvées dans les secteurs très polluants sont vraiment intéressantes, et nous espérons qu’elles plairont autant à nos lecteurs qu’à nous.
Vous venez d’être nommé par l’Inrock parmi les 10 militants de la nouvelle Génération Climat, que représente cette nomination pour vous ? Vous sentez-vous un devoir de sensibilisation ?
Cela apporte une joie immense, de l’étonnement et un syndrome de l’imposteur assez notable ! Nous avons été nominés aux côtés de personnes que nous côtoyons depuis quelques années, qui sont très actives et qui « milite » bien plus que nous. Néanmoins, nous sommes très fiers de voir que notre projet, aussi récent soit-il, puisse être mis en avant. Il serait un peu vaniteux de porter le fardeau d’un « devoir » de sensibilisation, mais nous avons une énorme envie de comprendre, d’agir et d’impliquer qui veut nous rejoindre.
Aujourd’hui, votre activité est basée en Europe ; avez-vous pensé à répliquer cette aventure sur un autre continent ?
Un autre continent signifie un avion, et nous ne volons plus. Notre van, Eugène, pourrait nous amener jusqu’en Asie, mais ce n’est pas prévu pour l’instant. Nous nous concentrons également sur l’Europe pour montrer que l’inspiration vient de nos voisins, et qu’il n’est pas nécessaire d’aller à l’autre bout de la planète pour trouver la dernière innovation qui sauve la planète. Il y a des synergies à trouver de l’autre côté de la frontière, alors gardons nos oreilles et nos yeux